Économie : A l’Est, La Covid-19 attaque le charbon à 50%
Source: Rechacofest&Giz /DataViz by ADISI-Cameroun

Selon les statistiques du Réseau des charbonniers des concessions forestières de l’Est, la production de 2020 est d’environ 3000 tonnes contre 5.904 tonnes en 2019 à cause de la crise sanitaire qui a provoqué un arrêt d’activités dans les sociétés forestières.

Le 27 avril 2021, quelques charbonniers du site de carbonisation de GRUMCAM de Mindourou dans le département de la Kadey à l’Est se sont rendus à leur lieu de travail après une longue période de chômage. « On essaye juste de relancer les choses parce ce que la crise sanitaire a fortement impacté l’activité de carbonisation. Il y a eu l’arrêt total des activités pendant plus de 4 mois en 2020 notamment les mois de mars, avril, mai et juin. Ceci parce ce que la société GRUMCAM qui nous fournie les déchets de bois a fermé ses portes. Les responsables nous ont expliqué que leurs clients en Europe ont fermé boutique à cause du confinement », indique Blaise Njankou, délégué du GIC-GCM de Mindourou qui compte 10 charbonniers permanents. En 2019, le GCM a produit un total de 10.087 sacs de charbon, soit 429 tonnes, mais en 2020, cette production a baissé de l’ordre de 50%.

Dans le site de Mempoé à Yokadouma dans le département de la Boumba-et-Ngoko, le GIC BOCHAMEMP qui profite des déchets de bois produits par la société CFC a été également frappé de plein fouet par la crise sanitaire. « L’année passée, on a arrêté le travail pendant plusieurs mois parce ce que la société ne produisait plus les déchets qu’on utilise pour la production du charbon. Depuis décembre 2020, la deuxième vaque de la pandémie à coronavirus a encore imposé un autre arrêt », regret Aliou, délégué du GIC BOCHAMEMP. Au cours de l’année 2019, ce GIC de 10 membres a produit 11.691 sacs du charbon, estimés à 497 tonnes, mais en 2020, la production a chuté à environ 60%.

Source: Rechacofest&Giz /DataViz by ADISI-Cameroun

Selon une étude menée par la Société Allemande pour la coopération Internationale (GIZ), plusieurs sites de production et de commercialisation du charbon existent dans la région de l’Est Cameroun. Il s’agit des sites de Lomié, Mindourou et Abong-Mbang, département du Haut-Nyong. Dans le Lom-et-Djerem, on retrouve les charbonniers à Woutchaba, Belabo, Bertoua et Mambaya. Dans la Kadey, les charbonniers sont regroupés à Batouri, à Mindourou et à Mbang. Enfin dans la Boumba-et-Ngoko, on les retrouve également à Ndeng, Lamedoum, Kika, Libongo et Mempoé. Dans ces localités listées, les producteurs du charbon se servent des déchets de bois collectés dans les sociétés d’exploitation forestière comme matière première. D’après la GIZ, au cours de l’année 2018, plus de 118 .017 sacs de charbon soit, 4.720 tonnes ont été produits pour un chiffre d’affaires de 259 637 400 Frs.

Source: Rechacofest /DataViz by ADISI-Cameroun

En 2019, et selon les statistiques du Réseau des charbonniers des concessions forestières de l’Est (RECHACOFEST), la production a augmenté à 5.904 tonnes grâce à l’appui des partenaires. « A travers l’appui des partenaires (MINFOF, MINEPDED et GIZ), nous avons amélioré le maillon approvisionnement et production. Par exemple, ils ont facilité la signature des conventions de mise en notre disposition des rebuts de sciage par les sociétés forestières. Le renforcement des capacités des groupements des charbonniers dans les techniques améliorées de production. Ces appuis ont eu un impact dans le volume et la qualité du charbon produit », affirme Minko Martin Luther, président du RECHACOFEST.  Malheureusement ces efforts pour rendre la filière attractive ont été effacés par la pandémie de la Covid-19 du fait de la fermeture des sociétés forestières qui produisent les déchets de bois.

Plus de 2500 familles impactées

Environ 500 charbonniers permanents, réunis autour de 12 entités (GIC, association et coopératives) ont été répertoriés à l’Est. A ce nombre, il faut ajouter les métiers connexes à la production et commercialisation du charbon. Il s’agit de ceux qui empilent et vidangent les fours, les couturiers de sacs, les manutentionnaires, les restaurateurs autour des sites et les élèves qui font des jobs pendant les weekends et les congés. « Chaque charbonnier permanant a au moins 5 personnes associées pour la bonne marche de son activité. Donc, si on multiplie les 500 charbonniers permanents par 5, on va se retrouver avec un minimum de 2500 personnes qui vivent dans la région de l’Est à cause de la production et la commercialisation du charbon », indique Minko Martin Luther. Ce dernier regret cependant que « l’année dernière, beaucoup de charbonniers sont morts faute de moyens financiers pour se soigner et beaucoup d’enfants des charbonniers n’ont pas fréquenté normalement ». Malheureusement, dans la riposte contre la Covid-19 note-t-il, aucune mesure d’atténuation n’a été accordée à la filière charbon par le gouvernement et ses partenaires.

Alternatives

Les conséquences de la dégringolade de la filière charbon sont énormes. « Faute des sources légales de ravitaillement, nous craignons le retour au prélèvement anarchique du bois dans la forêt et les espaces agricoles, ce qui entraine la dégradation de l’environnement et les conflits agropastoraux », note un environnementaliste. De son côté, le RECHACOFEST pense déjà à des alternatives car si la situation actuelle persiste, certains charbonniers qui exerçaient avant dans le braconnage notamment ceux des zones de Yokadouma, Libongo et Kika, risquent retourner à la chasse des animaux pour survivre.

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Portant la chasse de ces animaux et la coupe illégale des forêts sont interdites par la Loi de 1994 portant sur le régime des Forêts, de la faune et de la pêche. « Dans le contexte actuel, nous essayons d’identifier les nouveaux sites de production pour affecter nos charbonniers comme le site de Mambaya à Belabo. Nous sensibilisons aussi les charbonniers à ne pas entrer dans la coupe illégale et le braconnage. Nous sommes en contact avec le programme ACEFA pour solliciter le financement des microprojets agricoles et d’élevages comme alternatives », conclue Minko Martin Luther

Sébastian Chi Elvido à l’Est

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